Interview de Sarah de 20 Avril

Interview de Sarah de 20 Avril

Mais qui es-tu ? Quelle est ta trajectoire ?

Je m'appelle Sarah, alias Tata Paillettes ou Sarah Paillettes. J'ai lancé ma marque 20 avril : je crée des bananes personnalisées et uniques. À côté, je travaille comme directrice de post-production en télévision et cinéma, où je gère tout ce qui se passe après le tournage jusqu'à la livraison (chaînes, cinéma, distributeurs). Concrètement, je coordonne les équipes, la logistique et résous les problèmes techniques, faisant office de médiatrice entre les différents métiers (réalisateurs, monteurs, étalonneurs, etc.).

Ce job à plein temps n’a rien à voir avec les bananes, mais en tant qu’intermittente, j’ai parfois du temps libre. Pendant le confinement, comme beaucoup, j’ai commencé à créer de mes mains. J’ai fait une première banane pour moi, puis une autre dès que je trouvais un tissu sympa, comme un manteau en fausse fourrure déniché en friperie. Après quelques soucis, comme la décoloration sous la pluie, j'ai cherché des alternatives et suis tombée sur l’idée de réutiliser des parapluies cassés. Maintenant, je récupère les tissus de parapluies cassés dans les rues de Paris pour mes créations.

Je chine aussi dans les friperies et chez Emmaüs, où j'achète du linge de maison (draps, rideaux, etc.) que je transforme en bananes. J’aime les tissus d’ameublement, épais mais pas trop lourds. Des amies qui tiennent une boutique de créateurs m'ont encouragée et m'ont parlé du marché de Noël du Carreau du Temple, un objectif que je vise pour 2025. Mon travail ayant repris, j’ai dû ralentir la production, mais ma rencontre avec Marine et l'opportunité de votre pop-up m'ont motivée à me relancer.

 

Comment ton projet a-t-il vu le jour et quelle en est l’origine ?

Je suis autodidacte, je n’ai jamais pris de cours de couture. J’ai commencé il y a 15 ans sur la vieille Singer de ma grand-mère, qui ne fait que du point droit. Ensuite, j'ai acheté une machine à coudre Lidl pour débuter sans trop investir, et il y a un an et demi, je me suis procuré une machine plus performante pour coudre des tissus épais et faire des finitions propres.

Je couds les bananes sur l’envers pour qu’il n’y ait pas de coutures apparentes, ce qui est plus esthétique. Le processus peut être compliqué selon l’épaisseur du tissu, notamment au moment de retourner la banane. Le plus long reste la découpe des tissus en double pour l’intérieur et l’extérieur.

Je m’étais renseignée sur des cours de couture à la mairie de Paris, mais ils étaient réservées aux projets de reconversion. Comme c’est avant tout un projet annexe pour moi, je ne me voyais pas prendre la place de quelqu’un avec un projet de reconversion plus abouti.

 

Marine t’a rencontrée en cours de céramique, et on sait aussi que tu es une nail artist carrément douée ! Quels autres talents caches-tu ?

J’adore créer avec mes mains et découvrir de nouvelles techniques à travers des ateliers. J’ai commencé par le tricot puis la broderie, la peinture sur céramique, j’ai exploré le tissage, le punch needle, le crochet… et bien d’autres activités. La couture m’a particulièrement plu parce que c’est moins physique : pas besoin de garder les bras en l’air ou de manipuler des outils lourds. La céramique, par contre, est plus compliquée à pratiquer chez soi, les cours coûtent cher et cela rentrait en conflit avec mon nail art ! Avec la céramique, il faut des ongles courts, et manipuler l’eau et la terre, même avec du vernis semi-permanent, c’est compliqué. Mais c’était une belle expérience. Globalement, je suis plus attirée par le crafting et le DIY que par les activités sportives ou en extérieur. En couture, on accompagne le tissu, on le guide, et c’est vraiment ce que j’aime.

 

À ce qu’il paraît, tu aimes mettre des paillettes dans ta vie ?

Oui ! Depuis que je suis petite, je suis dans le cliché « j’aime ce qui brille ». Quand j’achète une jupe ou une robe, je vérifie toujours si elle tourne ! J’adore les paillettes, ce n’est pas pour rien que les enfants m’appellent Tata Paillettes et les adultes Sarah Paillettes, car il y en a toujours sur moi. Je suis une grande fan de Sisi la Paillette, et je n’hésite pas à adopter des looks entièrement pailletés. Pour le concert de Taylor Swift, je me suis même fait une veste à franges pailletées. Je trouve que tout est plus fun avec des paillettes, surtout au milieu du gris parisien. Dans un contexte parfois compliqué, politiquement et socialement, les paillettes apportent un peu de légèreté. Sans elles, ce serait vraiment très dur !

 

C’est un projet centré sur l'upcycling et la seconde vie des tissus. Quelle est ta vision sur l'industrie du textile et ton rapport aux vêtements ?

L'industrie textile est complexe, et je suis contre le « made in China » et les plateformes comme Temu. J’essaie de m’approvisionner en seconde main ou en made in France mais quand on dépasse la taille 44, c’est compliqué, surtout en friperie où les tailles et l’offre sont limitées. Pour les tissus, les coupons de trois mètres sont rares, même chez Emmaüs, mais parfois je tombe sur des pépites, comme un tissu de costume ou un joli rideau en jacquard que je transforme en banane ou en veste.

Je marche souvent au coup de cœur et, même si je craque encore parfois pour du neuf en magasin de tissus, je privilégie les ressourceries. Pour mes bananes imperméables, je récupère des parapluies cassés dans les rues de Paris, surtout les jours de pluie et de vent ! J’emporte mes ciseaux et découpe sur place pour ne pas transporter les armatures. Mes amis et ma famille me mettent aussi de côté leurs vieux parapluies, et j’en trouve parfois dans des endroits inattendus comme chez mon ostéo (rires).

Je ne stocke jamais de tissu sans savoir ce que j’en ferai : chaque trouvaille est visualisée en création unique. Par exemple, une taie d’oreiller me permet de faire seulement deux bananes, rendant chaque modèle impossible à reproduire à l’identique. Je préfère proposer des pièces uniques, avec des options de personnalisation pour les clients, plutôt que de faire des séries. Cela me permet de garder mes créations originales et en phase avec mes découvertes et coups de cœur.

 

Quelle sera ta sélection pour le Pink Power Store ?

Des bananes et encore des bananes ! C’est un accessoire tellement pratique. J’ai plein de sacs à main, mais au final, je ne sors qu’avec mes bananes. Elles libèrent les mains et gardent l’essentiel à portée, ce qui est idéal quand on a des douleurs au dos ou aux cervicales. Contrairement aux sacs à main qui déséquilibrent, les bananes sont légères et proches du corps. Elles reviennent beaucoup à la mode et se prêtent bien aux variations : on peut facilement les changer selon la tenue ou la saison, contrairement à un sac en cuir coûteux qu’on garde longtemps.

J’utilise principalement deux tailles : M et L. La taille L peut contenir un livre de poche, mais elle est plus encombrante. Le choix des tissus joue beaucoup sur le confort : les bananes en tissu de parapluie, même avec du molleton, restent légères, alors que celles en gabardine sont plus rigides.
Pour le Pink Power Store, je proposerai la taille M avec une pochette à pression à l’extérieur et une pochette intérieure, toutes différentes et uniques. Mais je voulais aussi que chaque personne puisse choisir les tissus de sa banane.
C’est pour cela qu’il y aura la possibilité de commander sa banane en choisissant la taille, S, M ou L, le tissu extérieur, le tissu intérieur, la présence ou non de pochettes intérieures et/ou extérieures ainsi que le sens de l’ouverture du zip selon le porté. Un modèle de chaque taille ainsi que des échantillons de tissus seront à disposition pour faire ces choix. Les tissus étant souvent issus de recycleries, pas de risque d’avoir la même que quelqu’un d’autre !

 

 

Quel est le sens ou l'histoire derrière le nom de ta marque, "20 Avril" ?

Il y a dix ans, je faisais des bijoux et je cherchais un nom pour ma marque. J’aurais aimé inclure « paillettes », mais ça sonnait souvent trop cucul ou cheap, sauf pour Sisi la paillette bien sûr ! Lors d’un dîner, un ami m’a proposé « 20 Avril », mon anniversaire. J’ai trouvé que ça sonnait bien : court, simple, et adaptable à plein de créations futures. Contrairement à une amie qui regrette le nom trop spécifique de sa marque, je voulais un nom qui me représente mais reste universel. Un ami graphiste m’a aidée pour mon logo, et je le rémunère en bières (rires).

 

De qui est composée ta clientèle ?


Pour l’instant, ma clientèle se limite surtout à mon entourage, principalement des femmes entre 30 et 40 ans, parisiennes. C’est un peu la cible des bananes actuelles, dans l’esprit de marques comme Rive Droite ou Make My Lemonade.

 

Comment t’organises-tu en termes de créativité ? Quelle est ta routine de travail ?

Étant intermittente, j’ai des journées que je peux consacrer à la production, et j’ai testé plusieurs méthodes. D’abord, je faisais tout d’un coup : choix des tissus, découpe, assemblage, et finalisation sur une seule banane, mais c’était long. Maintenant, j’ai opté pour un travail par étapes sur plusieurs modèles : une journée pour choisir les tissus, une autre pour découper, puis assembler, monter les bananes à l’envers, etc. C’est beaucoup plus pratique et productif, j’ai vraiment l’impression d’avancer à la fin de la journée. La découpe est longue et fastidieuse, alors que la couture, une fois tout découpé, se fait presque à la chaîne, il ne reste plus qu’à assembler.

 

Qui influence le plus ce que tu produis ?

Oh, clairement Taylor Swift ! Je suis fan depuis le confinement, ça commence à durer un peu (rires). Elle a sorti deux albums juste après le COVID, et je n’ai pas pu décrocher. Je suis allée la voir en live en juin, j’ai des friendship bracelets, et ses concerts sont hyper safe. Elle a créé cette culture des bracelets pour que les gens qui viennent seuls puissent échanger avec d’autres. C’est un peu une secte ! (rires). En mode fille, paillettes et robe qui tourne, on est bien avec Taylor Swift. Elle véhicule des messages bienveillants, et peu d’artistes offrent des primes de 100K à chaque chauffeur de tournée. Oui, je suis Taylor Power !

 

 Crédits photo : 2in